Un exemple d’analyse-étude, de requalification et sauvegarde du patrimoine culturel et architectural de l’oasis de Figuig
Monsieur Maurizio CAFAREllI, Directeur du programme Restauration du patrimoine de l’Oriental (OInG Africa 70 (Italie), représentant de la ville de lille
Rapport de la Coopération Internationale dans le domaine de la Préservation du Patrimoine Cas du projet « Requalification du Patrimoine Culturel de l’Oasis de Figuig»
Un exemple d’analyse-étude, de requalification et sauvegarde du patrimoine culturel
et architectural de l’oasis de Figuig.
« non c’e’ nulla di più fragile dell’equilibrio dei bei luoghi.
Le nostre interpretazioni lasciano intatti persino i testi,
essi sopravvivono ai nostri commenti
ma il minimo restauro imprudente inflitto alle pietre,
una strada asfaltata che contamina un campo
dove da secoli l’erba spuntava in pace creano l’irreparabile.
La bellezza si allontana; l’autenticità pure.”
Marguerite yourcenar
“Si tu as une pomme, que j’ai une pomme,
Et que l’on échange nos pommes, nous aurons chacun une pomme.
Mais si tu as une idée, que j’ai une idée et que l’on échange nos idées,
nous aurons chacun deux idées.”
George Bernard Shaw
Les citations ci-dessus traduisent bien le paradigme de notre projet et ses modalités d’intervention. En effet, cela explique la déclinaison des activités en sauvegardant d’un côté
l’analyse rigoureuse et attentive pour une restauration correcte et, en même temps, la nécessité, à travers l’échange d’idées et le dialogue interculturel, de partager de telles interventions avec la collectivité locale, celle de Figuig en l’occurence.
nous allons encadrer les projets de requalification de l’oasis de Figuig, de plus en plus dans l‘intérêt grandissant que les coopérations internationales portent aux projets de développement culturels comme vecteurs de sauvegarde du patrimoine humain, mais aussi
comme contribution pour que le patrimoine culturel devienne élément de développement économique au-delà de la contribution nécessaire, comme la lutte contre la désertification et la préservation de la diversité de l’environnement.
La conservation de l’oasis et de son patrimoine architectural en terre crue présente un défi
ardu en ces temps de globalisation et de diffusion de pratiques négatives qui touchent
aussi bien le domaine environnemental, ou encore le domaine des droits de l’homme : la sauvegarde du patrimoine de Figuig n’est pas un « problème » spécifique au Maroc ou aux seuls pays en voie de développement : c’est un problème de la planète entière et il appartient à toutes les régions méditerranéennes d’en assurer la défense.
C’est de là que commence pour nous la demande de classement de Figuig comme Patrimoine Mondial reconnu par l’UNESCO.
On pourra objecter que Figuig est seulement une oasis « à l’abri du désert », mais il faut souligner que son existence constitue un « ribat » (forteresse destinée à la formation et à la résistance) : elle permet de combattre et de résister face à la désertification qui avance
inexorablement dans la région orientale du Maroc, en poussant même jusqu’aux côtes de la « mare nostrum ». La gestion de ce site exceptionnel, la réhabilitation du patrimoine architectural et environnemental comme facteur de rééquilibrage de l’espace « oasien » deviennent donc les sujets prioritaires à nos yeux et dans l’intérêt de tous .
Dans les détails, le projet, objet de la présentation, cofinancé par la coopération
italienne pour le compte de qui agit l’O.N.G italienne « Africa 70 », est géré avec des partenaires locaux - la Municipalité de Figuig, l’Agence de l’Oriental et le tissu associatif de Figuig - qui interviennent aussi bien aux niveaux opérationnel et financier.
l’oasis de Figuig dans son contexte
La ville de Figuig occupe une place stratégique importante ; elle est parmi les oasis les plus célèbres et représente un carrefour sur plusieurs plans :
• porte du désert, position médiane entre le haut atlas et l’atlas saharien ;
• situation sur la frontière Maroco-Algérienne ;
• carrefour caravanier qui relie le Nord de la Méditerranée et le Sud du grand erg algérien ;
• carrefour de spécificité géographique/territoriale, de biodiversité et de produit agricoles ;
• carrefour de relation, humaine/culturelle, architecturale/environnementale.
Ce dernier point est la clé d’interprétation de la particularité entière de Figuig dans laquelle
se conjuguent et s’harmonisent à la perfection le patrimoine matériel et le patrimoine immatériel, fait de relations sociales, de règles d’entretien de l’oasis, de créativité ouvrable, de témoignages culturels ancestraux et d’une communauté encore fondée aujourd’hui sur la tolérance, l’accueil et le dialogue. Cette situation était à l’origine de son poids historique et politique, et de son peuplement important dans la zone.
nous pouvons dire que Figuig est une oasis « fondée », depuis le début : les réalisations physiques : recherche des sources, construction du système hydrique, exploitation des ressources agricoles et de la palmeraie, construction du patrimoine architectural, se sont conjuguées avec les codifications d’importantes règles collectives qui ont représenté le vrai caractère exceptionnel de Figuig et de la nécessité actuelle de sa sauvegarde. Chaque élément caractérisant l’oasis est mise en relation avec dans une sorte d’interdépendance fonctionnelle.
C’est pour cela qu’il est important de sauvegarder et le patrimoine matériel, actuellement menacé, et le patrimoine immatériel et les pratiques sociales en voie de disparition.
Figuig est composé de sept ksour : zenaga, Laabidate, Loudaghir, Ouled Slimane, Lamaiz, Hammam Tahtani et Hammam Foukani. La multiplicité des ksour, parfois en lutte, a demandé un système relationnel de rapports territoriaux et de règles constructives qui sont à la base, encore aujourd’hui, de la configuration et de la particularité de Figuig.
Chaque ksar dépendait des ressources de sa palmeraie et était protégé par des remparts.
Le rapport spatial se développe à l’intérieur pour ensuite les rapporter aux autres ksour pour la gestion de la palmeraie et des sources.
En particulier, tout un réseau hiérarchique de canaux souterrains, principaux et secondaires, dans une sorte de labyrinthe « escheriano » en démarrant des sources principales, règlent toujours la distribution des eaux à Figuig. L’entretien du système doit être sauvegardé : du point physique, avec des interventions d’entretien, et du point de vue immatériel, en cataloguant et en conservant les pratiques d’exploitation des eaux qui conjuguent
à la perfection l’exigence collective de l’eau mise en relation avec la propriété des terrains de la palmeraie.
En effet, les relations entre le palmier, l’eau et le système traditionnel d’irrigation constituent le fil conducteur de l’architecture oasienne, participant à l’édification du modèle paysager.
Il en va ainsi pour les relations entre les habitants : si les hommes se sont montrés créatifs dans le domaine de l’irrigation traditionnelle, en créant des instruments pour
une répartition ingénieuse des parts d’eau entre les habitants des différents ksour (les systèmes de khettarats), les femmes se sont spécialisées dans le métier du tissage de qualité,
ce qui justifie ce qu’ a dit un sage du 16ème siècle : « Figuig c’est Tzadert et Tsadert », ce qui veut dire que Figuig se base sur la relation entre l’eau et de tissage. Entre un bien naturel et collectif, l’eau, et les capacités de travail et de créativité individuelles.